Le 7 janvier 2025, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Paris a annulé une saisie-attribution pratiquée par la société Intrum Investment N°2 DAC et a déclaré abusive la clause de déchéance du terme contenue dans un contrat de prêt étudiant souscrit en 2011.
Cette décision s’inscrit dans le prolongement de la jurisprudence dégagée par la formation collégiale du Juge de l'exécution du Tribunal judiciaire de Paris le 13 novembre 2024, qui avait déjà consacré la possibilité pour le Juge de l'exécution de sanctionner le caractère abusif de ce type de clause.
À l’origine, un prêt avait été consenti en 2011 par la société Sogefinancement. Après défaillance de l’emprunteur, une ordonnance d’injonction de payer avait été rendue en octobre 2015.
Huit ans plus tard, en avril 2024, la société Intrum, cessionnaire de la créance, a fait pratiquer une saisie-attribution de 6 652,88 € sur un compte bancaire.
L’acte de saisie avait été dénoncé le 7 mai 2024, mais son régularité a été contestée. Le débiteur, assisté de Maître Paul-Emile BOUTMY, a saisi le juge de l’exécution pour en demander l’annulation et soulever le caractère abusif de la clause de déchéance du terme.
Dans ce dossier, Intrum réclamait non seulement le capital restant dû mais aussi des intérêts accumulés sur plusieurs années.
Or, en droit de la consommation, les intérêts périodiques se prescrivent par deux ans. Le juge a relevé que la société de recouvrement présentait un décompte incluant des intérêts manifestement prescrits, majorant artificiellement le montant réclamé.
Cette pratique avait déjà été dénoncée dans d’autres décisions récentes, le juge de l’exécution de Paris considérant qu’elle constitue une atteinte à l’information loyale du consommateur.
Le cœur du litige portait également sur la clause de déchéance du terme prévue dans le contrat de prêt.
Cette clause autorisait la banque à exiger immédiatement le remboursement de la totalité du capital, majoré des intérêts et frais, en cas de simple impayé, sans prévoir aucun délai de régularisation.
Le juge a jugé que cette stipulation créait un déséquilibre significatif au détriment du consommateur. Elle a donc été déclarée abusive et réputée non écrite, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation et de la CJUE.
La conséquence est lourde : le titre exécutoire de 2015 ne peut produire effet qu’à hauteur des échéances effectivement impayées, à l’exclusion du capital restant dû ou de l’indemnité de 8 % prévue par la clause.
La décision du 7 janvier 2025 n’est pas isolée. Elle s’inscrit dans la continuité de la formation collégiale du JEX de Paris qui, le 13 novembre 2024, avait déjà annulé une saisie sur le fondement d’une clause de déchéance du terme jugée abusive.
Le jugement du début d’année confirme ainsi une orientation nouvelle de la jurisprudence : les juges de l’exécution examinent désormais d’office la validité des clauses contractuelles, y compris lorsque la créance est consacrée par un titre exécutoire ancien.
Le juge de l’exécution a :
annulé la saisie-attribution du 30 avril 2024 et ordonné sa mainlevée,
déclaré abusive la clause de déchéance du terme du contrat de 2011,
rejeté les demandes de dommages et intérêts réciproques,
condamné Intrum Investment N°2 DAC à verser 2 500 € au titre de l’article 700 du CPC,
condamné la société aux dépens.
Les sociétés de recouvrement ne peuvent pas réclamer d’intérêts prescrits, leur inclusion dans le décompte peut être sanctionnée.
Les clauses de déchéance du terme, dépourvues de préavis ou de délai de régularisation, sont considérées comme abusives et privées d’effet.
Le JEX de Paris confirme son rôle central dans la protection des consommateurs face aux créances anciennes, même lorsqu’elles reposent sur un titre exécutoire.
Pourquoi la saisie a-t-elle été annulée ?
Parce qu’elle avait été diligentée par une société qui n’avait pas justifié de son mandat pour agir au nom du créancier.
Que devient le titre exécutoire de 2015 ?
Il ne produit effet que pour les échéances réellement impayées. Les sommes réclamées au titre du capital restant dû ou de l’indemnité de 8 % sont inopposables.
Cette décision est-elle isolée ?
Non. Elle confirme une décision rendue le 13 novembre 2024 par la formation collégiale du JEX de Paris et s’inscrit dans une nouvelle jurisprudence sur les clauses abusives.