Le 18 mai 2021, le tribunal judiciaire de Grasse a rendu une décision importante en matière de recouvrement de créances anciennes, en annulant une saisie-attribution engagée par la société Intrum Debt Finance AG sur la base d’une ordonnance d’injonction de payer rendue en 2007.
Cette décision, obtenue par Maître Paul-Émile Boutmy, illustre la vigilance accrue des juridictions face aux sociétés de recouvrement qui poursuivent des créances prescrites ou irrégulièrement signifiées.
???? Une créance ancienne reprise treize ans après le jugement
L’affaire trouve son origine dans un crédit à la consommation contracté auprès de Sogefinancement, condamné en 2007 à rembourser la somme de 6 820,87 €, assortie d’intérêts.
Ce titre a ensuite été racheté par Intrum Debt Finance AG, société spécialisée dans le recouvrement de créances cédées.
Or, plus de dix ans après le prononcé du jugement, Intrum a fait pratiquer une saisie-attribution en 2018, pour un montant supérieur à 8 000 €, sur les comptes du débiteur, sans avoir vérifié la validité du titre exécutoire invoqué.
⚖️ Prescription et absence de signification régulière
Représenté par Me Paul-Émile Boutmy, le débiteur a contesté la procédure, invoquant la prescription du titre et l’irrégularité de la signification de l’ordonnance d’injonction de payer.
Le juge a constaté qu’aucune preuve de notification régulière n’avait été produite, en violation des articles 654 et suivants du Code de procédure civile.
En l’absence de signification régulière, le titre ne pouvait produire aucun effet exécutoire.
De plus, la prescription décennale prévue par l’article L. 111-4 du Code des procédures civiles d’exécution était acquise : aucun acte interruptif n’ayant été accompli depuis 2008, la créance était éteinte au moment de la saisie.
???? Un titre caduc ne peut fonder une exécution forcée
Le tribunal a rappelé un principe fondamental :
« Nul ne peut exécuter un titre dépourvu de force exécutoire ou prescrit. »
En conséquence, la saisie-attribution de 2018 a été annulée, et Intrum Debt Finance AG a été condamnée à verser des dommages et intérêts, outre les frais irrépétibles au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Cette décision, parmi les premières rendues dans le ressort de Grasse contre Intrum, a depuis été confirmée par d’autres juridictions, qui adoptent la même rigueur dans le contrôle de la validité des titres exécutoires anciens.
???? À retenir
???? Un titre exécutoire doit être régulièrement signifié pour produire effet.
???? La prescription décennale éteint toute possibilité d’exécution au-delà de dix ans.
???? Une saisie fondée sur un titre caduc est nulle et expose son auteur à des condamnations.
???? Les juges de l’exécution veillent à la protection des consommateurs face aux sociétés de recouvrement.
???? Mise à jour : 5 octobre 2025
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